Tram sur pneus : une fausse économie qui coûtera cher – DNA

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Tribune publié le 30 juin 2011 dans le journal Dernières Nouvelles d’Alsace

Dans une tribune conjointe adressée aux DNA, les associations « Ecocité-Strasbourg » & « TC-Alsace » réagissent au projet de tram sur pneus de la CUS-CTS. Projet qui appelle, selon Pierre Ozenne, vice-président d’Ecocité-Strasbourg et Damien Senger, président de TC Alsace, « de nombreuses critiques, plus sur le choix du mode de transport que sur le tracé ».

« En 1989, la CUS a préféré le système « tramway fer » au lieu du métro « VAL » pour construire son système de transport en site propre (TSP). Ce choix a incontestablement démontré son efficacité pour transformer les usages et habitudes en matière de déplacements urbains et offrant un nouveau visage à la ville.

« Un système qui n’a de tram que le nom »

Le choix du tram sur fer a été confirmé par les extensions successives du réseau (de 9,8 km en 1994 à 48,2 km en 2010), permettant de faciliter et d’améliorer les déplacements au quotidien de milliers d’usagers, de créer un effet « maillage » cohérent du territoire, même si plusieurs quartiers et villes de la CUS l’attendent encore.

Aujourd’hui, ce choix est remis en question par l’exécutif communautaire et la CTS pour les prochains projets de TSP, notamment celui reliant Vendenheim à Eckbolsheim via Strasbourg Gare et Koenigshoffen. Le « tram sur pneus » de l’entreprise Lohr est imposé, système qui n’a de tram que le nom. Si ce choix se confirme, cela correspond à une régression après une vingtaine d’années de développement des transports collectifs.

Convaincus que cette nouvelle ligne de TSP est importante, nous y émettons toutefois de vives et profondes réserves quant au mode « tram sur pneus ».

Le tram sur pneus n’est pas qu’un véhicule, c’est un système à part entière.

À ce titre, il sera nécessaire de construire de nouveaux équipements dédiés pour l’entretien d’un nombre limité de véhicules (12 tout au plus). L’utilisation des installations tram existantes est impossible, pire le système du « tram sur pneus » ne permet pas de croiser les voies du tram actuel.

Le système « tram sur pneus » est totalement différent et incompatible avec les infrastructures du « tram sur fer ».

L’argument principal en faveur du tram sur pneus est son coût d’investissement, estimé à 10M€ le km contre 20M€/km pour le tram. Or ces chiffres biaisent la réalité : les TSP intègrent systématiquement la réfection totale des rues traversées, d’une façade d’immeuble à l’autre. L’insertion du « tram fer » stricto sensu coûte de 5 à 10M€ km.

Vulnérable en cas d’intempéries

À investissement égal, les coûts d’exploitation avec un tram sur pneu vont exploser, notamment par l’usure prématurée des chaussées (ornières) et la consommation d’énergie plus importante, aspects constatés dans les villes dans lesquelles ce mode circule, ce que justifiera encore de nouvelles augmentations des tarifs de la CTS, comme en mai dernier pour les mêmes raisons de charges d’exploitation.

En cas de neige, de présence de débris sur le rail, rien ne va plus ! Le tram sur pneus doit suspendre son service. La vulnérabilité du système obère le service rendu aux usagers et les finances publiques. On ne compte plus les déraillements à Nancy, à Caen ou à Clermont-Ferrand.

La CUS est une agglomération trop petite pour démultiplier inconsidérablement le nombre de modes de transport collectif différents, ce qui n’est, en revanche, pas le cas de Paris, par exemple.

Nous demandons que la poursuite des extensions des TSP soit réalisée sur une valeur sûre et démontrée, à savoir le tram sur fer, offrant la possibilité de disposer d’un réseau évolutif, compatible, maillé et cohérent, complété par les lignes de bus de qualité. En attendant, il existe de larges marges de manœuvre pour améliorer le réseau bus, qui ne doit pas rester un mode de seconde zone. »

Auteurs : Pierre Ozenne (écocité-strasbourg) et Damien Senger (TC Alsace, mobilité(s) et urbanisme)