Eurométropole : un programme Mobilité en demi-teinte
Nous vous conseillons de le lire en gardant son âge à l'esprit.
Le contexte de l'article peut ne plus être le même à présent.
La Ville a annoncé il y a quelques jours un nouveau programme d’extension du réseau de la CTS. Un programme léger mais attendu.
Comparativement à d’autres métropoles françaises, Strasbourg n’est clairement pas à plaindre au niveau de la mobilité. Dans les deux années qui suivent, trois lignes vont se voir étendues (si on compte la ligne E s’étendant sur les infrastructures existantes de la ligne A) et les projets sont abondants. Malheureusement, avec la baisse des dotations et des autres ressources, ainsi que l’explosion de la dette publique (aussi bien au niveau local que gouvernemental), nombreux sont les projets à avoir été reportés.
Malgré tout, la collectivité a multiplié les annonces ces dernières années, notamment le tramway Wolfisheim – Vendenheim via Koenigshoffen, combattu par des associations de riverains (et par TC-Alsace) dans sa version « tramway sur pneus« , un projet d’envergure, de près de 180 millions d’euros. Le projet avait finalement été reporté pour le repenser. Il s’agit de l’un des seuls axes majeurs de l’Eurométropole encore non desservi par un transport lourd. Et voilà qu’après des mois d’attente, le projet ressort enfin des cartons.
Une amorce de desserte pour Koenigshoffen
Revu à la baisse, le but est dorénavant de desservir principalement Koenigshoffen. Ou du moins, c’est le but annoncé. Car il faut l’avouer, le nouveau projet est très timide. Certes : 38 millions d’euros pour une mise en service en 2019, mais seulement trois stations avec un terminus au croisement de l’allée des Comtes.
Le tracé fait notamment débat. Depuis le début, les élus ont sous-entendu que la ligne C pourrait difficilement traverser la place de la Gare, le poids du tramway faisant peser un risque pour la dalle – bien que le maire Roland Ries ait indiqué que cela reste une possibilité. Quant au tracé via l’ancien tunnel de la Poste sous la gare, il est la principale raison de l’abandon du projet tram-train vers Molsheim de par le coût de son agrandissement et de sa restauration, il était donc fort peu probable que la Ville seule trouve l’argent pour le rénover uniquement dans le but de l’utiliser pour le réseau urbain.
Ainsi, on se retrouve avec peu de possibilités. Logiquement, c’est un raccordement aux lignes B/F qui est donc privilégié. Tout en conservant cette option, il aurait été intéressant de passer par la rue de Wasselonne plutôt que par le boulevard de Nancy pour économiser un peu de voies nouvelles. Mais le principal souci de ce projet, c’est bien sa timidité. Presque cinq ans depuis l’origine du projet de desserte de Koenigshoffen, plus de 15 000 habitants attendent la desserte de leur quartier. Leur impatience est compréhensible : les axes routiers sont surchargés et peu d’alternatives sont fiables (notamment les axes bus qui sans couloir bus, dépendent justement de cette circulation). Pendant ce temps, ces habitants ont vu un projet d’extension du tram A au cœur d’Illkirch se concrétiser malgré le peu d’engouement des Illkirchois(es) ou encore l’extension du tramway D vers Kehl, desservant un axe qui a vocation à être urbanisé.
Le maire a annoncé pour 2025 la possibilité d’un tronçon complémentaire rejoignant le terminus du tram D sur l’avenue François Mitterrand. Un horizon bien lointain pour le reste du quartier et pour les villes de Wolfisheim et Eckbolsheim qui suggèrent en attendant une extension partant du terminus actuel de la ligne D.
Une ligne E enfin achevée
Dans ce package d’annonce, une autre grande nouvelle : la ligne E va être étendue de trois stations et desservir… le cœur de la Robertsau ! La fin d’une ineptie qui date de fin 2007. La ligne s’arrêtant (littéralement) aux portes du quartier, ses principales fonctions sont la desserte symbolique des institutions européennes et la création d’une ligne esquivant le nœud congestionné Homme de Fer mais cela s’arrête là. Car si le terminus porte bien le nom de la Robertsau, il est si éloigné du cœur de vie et du bassin de population qu’il reste un terminus bien peu fréquenté.
En 2020, la ligne pourrait potentiellement conquérir 7 000 voyageurs en plus (selon les données de la ville), le tout pour 19 millions d’euros. Le tracé est pressenti depuis longtemps, on pourra toutefois regretter l’arrêt à l’Escale. Le but principal reste atteint mais une desserte jusqu’à la clinique Sainte-Anne aurait pu être intéressante (la proximité de la piscine de la Robertsau est un plus), en voie unique pour mieux se faufiler dans les derniers mètres.
Un BHNS pour désengorger Homme de Fer ?
Dernière dans la liste du packaging d’annonces de cette fin 2015, l’extension du Bus G. S’arrêtant actuellement place de la Gare, elle devrait être portée jusqu’au Parc de l’Étoile. Cette ligne a prouvé son utilité pour la desserte de l’Espace Européen de l’Entreprise avec un coût de réalisation raisonnable. Contrairement à d’autres réseaux français, la métropole n’a pour l’instant pas commis l’erreur d’installer du bus à haut niveau de service là où la fréquentation justifierait un tramway.
Ici, le projet est de créer une alternative aux lignes transitant via Homme de Fer pour desservir le sud de l’agglomération. Un projet logique sur un axe où la circulation automobile est reine et où un site propre peut s’installer. Le schéma directeur 2025 prévoit d’ailleurs la desserte de cette petite couronne par des voies de tramway dans le but de mailler le réseau. L’avantage de ce projet est de débuter le maillage du réseau pour un coût raisonnable, en outre, un site propre de BHNS peut par la suite être transformé en tramway. L’hôpital disposera en outre d’une desserte forte complémentaire à proximité direct de l’entrée du Nouvel Hôpital Civil (NHC).
Par la suite, il a même été évoqué l’extension de la ligne jusqu’au pont Churchill pour permettre la desserte du futur quartier Danube.
Malgré des annonces plutôt positives, laissant présager que la mobilité reste une des priorités de l’Eurométropole, l’association regrette que le schéma directeur des transports 2025 – établi en 2010 par M. Ries durant son précédent mandat, soit totalement oublié. Les temps ont certes changé – les capacités financières également, mais son ambition poussait l’Eurométropole comme un exemple de mobilité en France. Les trois projets annoncés vont dans le bon sens, toutefois le projet prioritaire vers Koenigshoffen reste insuffisant. En effet, un des plus gros quartiers de Strasbourg reste le principal oublié du réseau structurant de la métropole.